En 1946, le poète normand Jacques Prévert publie Histoires, son second recueil dont les poèmes sont volontairement plus brefs, comme de courtes fables qui alternent à plaisir leurs formes et leurs tons pour décrire des situations du monde quotidien. C’est ici avec une certaine mélancolie que l’auteur surréaliste revient sur ses souvenirs de vacances d’enfance, sur La Plage des sables blancs.

La Plage des sables blancs

Oubliettes des châteaux de sable
Meurtrières fenêtres de l’oubli
Tout est toujours pareil
Et cependant tout a changé
Tu étais nue dans le soleil
Tu étais nue tu te baignais
Les galets roulent avec la mer
Et toujours toujours j’entendrai
Leur doux refrain de pierres heureuses
Leur gai refrain de pierres mouillées
Déchirant refrain des vacances
Perdu dans les vagues du souvenir
Déchirants souvenirs de l’enfance
Brûlée vive par le désir
Merveilleux souvenir de l’enfance
Éblouie par le plaisir.

Jacques Prévert (1900-1977)
Extrait du recueil Histoires (1946)