Organisé chaque dimanche matin sur la Place de la République, le traditionnel marché aux puces de Sète attire depuis quelques décennies les Sétois, les chineurs et les touristes de passage. Mais depuis plusieurs mois, le marché se vide curieusement de ses exposants. Nous avons tenté de savoir pourquoi !


Dimanche 26 mai au matin. Comme souvent, nous allons flâner sur le marché aux puces de Sète à la recherche d’une éventuelle bonne affaire. Rendez-vous Place de la République, à mi-hauteur de l’île singulière, un quartier typique de la vie sétoise où se trouve, entre autres, la maison qui a vu naître Georges Brassens.

Etape obligée sur le parcours touristique de la ville, ce marché traditionnel et ses petits commerces attirent chaque dimanche une foule de promeneurs qui se mêlent aux chineurs et aux Sétois. Un lieu convivial un peu hors du temps sur une place semi-ombragée qui offre, à certains endroits, une jolie vue sur l’Etang de Thau.

Vers un bras de fer avec la mairie ?

Mais depuis quelques mois, le marché se vide peu à peu de ses exposants. Nous sommes donc partis à leur rencontre pour tenter de comprendre pourquoi. “Le problème, c’est la mairie”, nous explique Sophie, qui tient un stand de vêtements. “Avant, on payait la place le dimanche matin à l’entrée du marché. Maintenant, il faut aller la chercher à la mairie dans la semaine.” Selon la vendeuse, les exposants qui ne peuvent se déplacer jusqu’au centre-ville de Sète durant la semaine ne viennent donc plus.

Un peu plus loin, Florent semble lui aussi remonté contre la ville. Le jeune exposant, dont le stand de meubles est plutôt apprêté, nous rapporte avoir fait l’objet de plusieurs réflexions de la part des agents de la ville. “On est venu me dire que je n’avais rien à faire ici, que ce n’est pas un marché pour les professionnels. Alors que je ne suis pas brocanteur, je vends juste des jolis objets !”

Entre rumeurs et contraintes de nettoyage

En poursuivant notre visite, nous nous apercevons que les griefs s’accumulent contre la ville. “Ils font tout pour tuer ce marché”, soutient Jacqueline, pour qui ces revenus du dimanche sont “vitaux”. “Ils vont construire un parking souterrain sur cette place”, renchérit son amie Aline, “alors il faut nous dégager”. Contactée par la suite par nos soins, la mairie affirme qu’il ne s’agit-là que de “rumeurs et que le marché n’est pas du tout menacé”.

Pour Hervé, qui vend des biens culturels, le problème n’est pas là : “Nous devons être parti avant 13 heures pour qu’ils nettoient la place. Mais c’est entre midi et 13 heures que nous avons le plus de clients, qui nous demandent pourquoi nous sommes si pressés de ranger”. Et son épouse de renchérir : “Dans les autres marchés aux puces, la ville nettoie avant l’arrivée des exposants. Quand on s’installe ici, la place n’a pas été nettoyée depuis une semaine et c’est sale !”

La fin du marché dans une ambiance de chaos

Plus la matinée avance, plus l’ambiance du petit marché nous semble de moins en moins conviviale. Et à 12h30, la situation vire au chaos. Alors que la place est encore noire de badauds et que les exposants s’empressent à remballer, un camion de nettoyage déboule pour faire le ménage, provoquant au milieu de ce joyeux petit monde un gigantesque nuage de poussière.
Une voiture de la police municipale arrive à son tour. Un agent en descend et s’engage à faire le tour des stands pour presser les exposants. Nous nous approchons de lui. “La société de nettoyage se plaint de ne pas pouvoir nettoyer correctement car les exposants sont toujours en retard”, explique-t-il. “Pour le bien de tous, chacun doit suivre les règles et je suis là pour les faire respecter”, soulignant avec un certain humour que “dans le Sud, les gens ont besoin de coups de bâtons pour avancer !”

Une exposante récalcitrante lourdement sanctionnée

Nous commençons donc à deviner pourquoi les exposants ne se bousculent plus sur le petit marché. Depuis quelques semaines, un panneau d’interdiction de stationner, depuis l’ouverture du marché jusqu’à 14 heures, a été installé à l’entrée de cette place qui, durant la semaine, sert de parking aux habitants du quartier. Les automobilistes qui tentent de s’y introduire sont donc logiquement refoulés. Les exposants, quant à eux, sont censés la quitter.
C’est ainsi qu’à 13 heures passées, une exposante récalcitrante se voit verbalisée. “J’ai demandé au monsieur qui nettoie où je pouvais me garer car je ne peux pas partir maintenant”, explique Sylvie, qui réside à Mèze. Mais la sentence est tombée. La femme reçoit deux amendes : une première en tant qu’exposante, “pour ne pas voir quitté le marché dans les temps”. Une seconde en tant qu’automobiliste, “pour ne pas avoir respecté l’interdiction de stationner”.

Pour préserver les personnes interrogées, leurs prénoms ont été modifiés.