En 1840, Théophile Gautier traverse les Pyrénées pour se rendre en Espagne. Le poète, qui n’en est pas à son premier voyage, est alors inspiré par les Contes d’Alfred de Musset et les Orientales de Victor Hugo, son mentor. De ce périple va naître de nouveaux poèmes marqués par la fraîcheur du regard et un ravissement quasi juvénile. En témoignent ces quelques vers extraits du recueil España, Au bord de la mer, paru dans les Poésies complètes en 1845.
Au Bord de la Mer
La lune de ses mains distraites
A laissé choir, du haut de l’air,
Son grand éventail à paillettes
Sur le bleu tapis de la mer.
Pour le ravoir elle se penche
Et tend son beau bras argenté ;
Mais l’éventail fuit sa main blanche,
Par le flot qui passe emporté.
Au gouffre amer pour te le rendre,
Lune, j’irais bien me jeter,
Si tu voulais du ciel descendre,
Au ciel si je pouvais monter !
Théophile Gautier (1811-1872)
España, Poésies complètes, 1845